Pandémie, épidémie, virulence, contagion, "peste aviaire"… tout est bon pour alimenter une crise aberrante provoquée par des médias survoltés et inflationnistes. Joseph Grimaud, (Ets Grimaud spécialisé dans la reproduction des volailles) l'a rappelé avec véhémence la semaine dernière : "nous sommes dans l'irrationnel". Ce n'est pas la triste disparition d'un élevage complet de près de 400 dindes cette même semaine qui change quoi que ce soit à cet événement. C'est un problème réel, il nécessite la mise en place de mesures de protection mais il n'y a aucune raison de sacrifier à la psychose collective un pan entier de notre agriculture. En revanche, ce qui est intéressant et inquiétant, dans cette apparente pandémie, c'est son mode de dissémination.
Il m'apparaît évident de devoir faire le parallèle avec un autre risque hautement plus important sur le long terme : celui des OGM végétaux.
Le schéma actuel de dissémination de la grippe aviaire du fait des oiseaux migrateurs est un modèle facilement observable. Il est caractéristique de ces modes de dissémination aérienne qui abolissent les frontières, toutes les frontières. Il n'est qu'à se rappeler le fameux "nuage radioactif" de Tchernobyl que la discipline et la fidélité à la France avait soi-disant stoppé à la frontière franco-italienne…
La pollinisation, indispensable étape de la fécondation des végétaux, est réalisée par de multiples processus différents mais les plus courants utilisent un mode de dissémination aérien. Qu'il s'agisse des insectes (pollinisation entomophile), des oiseaux (ornithophile) ou du vent (anémophile) c'est la voie des airs qui est privilégiée.
Je ne fustige pas les OGM et ne m'associe pas aux "coupeurs". Mettre au point un riz cultivable en zone aride ou semi-aride, obtenir de l'hémoglobine humaine à partir du tabac ou introduire un résistance à la rouille dans une plante vivrière plus rapidement que ne le ferait la sélection génétique classique, me semble aller dans le sens du progrès au bénéfice de l'homme. De longue date, la sélection variétale et l'amélioration génétique ont permis des avancées spectaculaires tant sur le plan agronomique et de l'alimentation humaine qu'au profit de la thérapeutique.
Par contre, je m'inscris en faux contre ces manipulations génétiques qui tendent à transformer le végétal en usine à insecticide ou à fongicide. Il ne s'agit plus d'un bénéfice pour l'homme mais d'un profit financier. Et à quel prix ?!?
Non content, au travers de critères de rendement et de profitabilité d'une standardisation outrancière des variétés, de réduire considérablement la biodiversité, c'est ouvrir la boite de Pandore que de lâcher dans la nature des gènes dont la dissémination est incontrôlable.
Parmi les oiseaux atteints par la grippe aviaire, certains vont résister. Affaiblis par la maladie, ils n'en mourront pas. C'est un phénomène de résistance que chacun connait et la vaccination est une des voies d'amélioration de cette résistance chez l'animal. Dans le règne végétal, il existe aussi de nombreuses formes de résistance aux parasites et c'est cette biodiversité, cette grande variabilité génétique des espèces qui permet à la sélection variétale de révéler les lignées les plus solides. Les insectes sont, évidement, les parasites contre lesquels les résistances sont les plus difficiles à obtenir; mais est-il besoin de prendre de tels risques en induisant ou détournant de nouvelles voies de biosynthèse vers la production de molécules toxiques ?
Le modèle de la dissémination de la grippe aviaire est transposable à la dissémination du pollen et donc à celle des gènes modifiés des végétaux cultivés en plein champ. Faux problème, me dira-t-on, puisque les variétés concernées sont apparemment stériles ! Laissons le temps faire sont œuvre. Qui peut aujourd'hui s'engager sur une sécurité totale concernant ces OGM ? Il y a quelques mois à peine, le H5N1 ne pouvait passer chez l'homme; depuis nous dénombrons tous les jours de nouveaux cas mortels et récemment un chat a été découvert mort atteint lui aussi du virus. Comment obtient-on des OGM sinon en transgressant les barrières naturelles entre règnes par l'intermédiaire de structures de type virale.
Pour le secteur de l'agriculture biologique, qui est en pleine croissance et participe au maintien – sinon à la restauration - de la biodiversité, c'est un risque de pollution majeur contre lequel rien, ni personne ne pourra être protégé.
Restons donc prudents et observons avec beaucoup d'attention la manière dont nous subissons cette pandémie sans pouvoir la stopper autour de la planète. Que fera la nature, demain, des gènes tout neufs que nous lui offrons aujourd'hui et qui pourraient bien être notre perte après-demain ?
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